Palais des sports, XVème arrondissement de Paris. La dernière fois que je suis venu dans cette salle (généralement dédiée aux spectacles pour petites vieilles et au patin à glace)
c’était le 18 Juin 1996, pour Iggy Pop, déjà ! En 11 ans, le vieil Iggy a perdu toutes ses mauvaises habitudes relatives à la consommation de drogues, il a cessé de s’astiquer
le chinois sur scène, mais il est forcément moins en forme. Toutes ses articulations sont systématiquement sur le point de lâcher, sa hanche le fait parfois hurler de douleur
et ses os prêts à imploser à chaque bond de trop. Sa musique, elle, a le mérite d’être nettement plus précise et passionnée que lors des précédentes tournées. Pas question
de bâcler un titre du répertoire des Stooges, ils sont tous trop précieux et mériteraient une place au Louvre, à côté de Mona Lisa… si le rock y était représenté !
Après une première partie très honorable, les Stooges déboulent, le feu au cul, suivi d’un Iggy extrêmement motivé et décidé à clouer le bec aux sceptiques. Les déhanchements,
sauts, tortillements du lutin Iggy s’enchainent à une vitesse diabolique alors que la fosse se resserre et entame une lutte sans relâche pour être le plus près possible du héros.
Malgré une setlist trop prévisible, l’Iguane brise les règles qu’il s’était imposé au fil du temps, et boude le mur d’enceintes où il grimpe habituellement sur Down on the street
pour plonger tête la première dans le public. Il remet ça sur 1969, un sourire radieux aux lèvres puis une troisième fois sur I wanna be your dog. 60 ans et il commence son concert
en fou, ivre de son public ! On adore ! Tout va déjà trop vite et Il annonce la couleur de My idea of fun en balançant son refrain avant que le groupe n’attaque le titre.
Cette fois, tout le monde connaît les paroles et Iggy en semble d’autant plus ravi. Il mime une décapitation en criant « is killing everyooone ! », se crache dessus,
s’asperge d’eau et balance son micro dans les dents des hurleurs hystériques.
De plus en plus de pilotes de l’air ratés tentent de slammer ; vols de courte durée avec crash assuré entre les gros bras de la sécurité… Moment de répit de courte durée sur Dirt
avant de réattaquer de plus belle avec Real Cool Time. L’ambiance survoltée contraste parfaitement avec les éclairages très chiches et les contre jour rouges-orangés intimistes.
Les fans sont tous en chien de faïence, prêts à éjaculer leur corps trempé sur scène dès qu’Iggy donnera le feu vert pour qu’ils le rejoignent. En quelques secondes la scène est
effectivement envahie de danseurs et Joss, le cow-boy roadie d’Iggy doit protéger ce dernier pour ne pas qu’il se fasse dévorer vivant. Une nana capuchonne Iggy d’un bonnet de
laine – très chic – et No Fun commence déjà à retentir. Encore un plongeon sur le refrain « to be alone » et encore des poignées de cheveux en moins tant les spectateurs
deviennent dingues en sentant le corps de leur dieu glisser sur leurs poings et griffes. La scène se libère rapidement des ses envahisseurs lors de la présentation du groupe
(« on guitar, the undisputed heavyweight champion of the worrrrrrld Rooooon Ashetoooon ! ») et le napalm se remet à couler à flots sur nos crânes pendant l’enchainement
chaotique 1970/Funhouse.
Le saxophone bourdonne dans nos oreilles, Iggy crache ses tripes, la violence ne cesse d’être érotico guerrière dans les premiers rangs. Contre attaque en mode totalement aspergé et dégoulinant d’Iggy sur Skullrings et Trollin’, qui marquent la fin du set avant le rappel. Toujours aussi souriant depuis le début du concert (55 minutes plus tôt), Iggy remet le couvert avec Not Right / Electric Chair / Double Dog. Se baladant entre la scène et les barrières du public, il se décide à déboutonner son froc, laissant entrevoir un morceau premier choix de son steak légendaire, puis à monter sur un mur d’enceintes sur le côté de la scène pour un ultime plongeon. Re-salutations, et c’est fini. Déjà ?! Oui, mais putain, on a tous jouit Iggy ! Tout le monde ce soir est au septième ciel, avec un sifflement dans les oreilles, le concert était totalement dément, hyper énergique et Iggy brillant au possible. On a aimé, il a aimé, la quantité de plongeons le prouve. Un de mes meilleurs concerts d’Iggy fucking Pop ! Hail Iggy, oh hail !
Gui Brigaudiot